LE SOL, UN CAPTEUR DE CARBONE À PRÉSERVER

par Raphaël Richard, le Mardi 19 Avril 2022

Le sol, un capteur de carbone à préserver

Le sol, un capteur de carbone à préserver

Les injonctions pour limiter l'urbanisation et les bonnes pratiques pour préserver les sols agricoles commencent à se diffuser face aux enjeux climatiques. Le sol présente en effet un important potentiel de stockage du carbone.

« Ce que l'on prône au maximum, c'est de débitumer, de planter, de remettre de la vie au sol », explique Myriam Germain, urbacultrice spécialiste du sol. Et pourquoi une telle volonté de préserver la terre ? Car le sol offre un important potentiel de stockage de carbone et constitue donc un des principaux leviers pour limiter les gaz à effet de serre. Or le développement urbain a tendance à consommer des zones naturelles ou agricoles, même si le concept de zéro artificialisation nette – qui implique de « faire la ville sur la ville » – commence à se diffuser. Et un sol bitumé ne stocke pas de carbone.

Il y a toutefois des bonnes pratiques dans les espaces urbains qui permettraient d'améliorer la qualité des sols. « Avec les déchets de cuisine des particuliers et des établissements, il existe un gros potentiel de production de compost en ville. On peut aussi valoriser la taille des arbres, la tonte et les divers entretiens des espaces verts en paillage. Ces différentes matières sont de l’or brun pour le sol, pour l’enrichir et nourrir la vie qu’il abrite », rapporte Myriam Germain. Les arbres sont également un gros réservoir de carbone, mais leur potentiel est d’autant plus important quand ils bénéficient d'un espace souterrain libre, conséquent et qu'ils sont reliés les uns aux autres par leurs racines. Toutefois, la disponibilité des terres limitée, les sols, la plupart du temps pollués, et l'ombre projeté des bâtiments importante, constituent des freins non négligeable pour leur développement.

Plusieurs éléments proposés par le modèle Résilience Urbaine préservent et valorisent les terres : il en est ainsi du développement de mini-forêts, de la mise en place de vergers inspirés du "label bas carbone" ou encore de la création de haies multifonctionnelles. L'entretien des espaces verts peut, lui, s'inspirer des méthodes agricoles respectueuses des sols, telles que celles préconisées par le mouvement Maraîchage sur Sol Vivant : utiliser les animaux en pâturage tournant dynamique, restituer les résidus de culture au sol, favoriser la vie du sol, arrêter de travailler les sols systématiquement, etc. énumère Myriam Germain.

Un accompagnement nécessaire

Pour les agriculteurs conventionnels, ces solutions émergentes ne sont pas évidentes à mettre en œuvre. Il reste encore compliqué de se passer du labour, de mettre en place un non travail du sol et de le remplacer par des rotations et des couverts végétaux. Cette transition nécessite d’être formé et accompagné financièrement. « Les bénéfices multiples apparaissent à long terme, mais les besoins financiers sont à court terme », remarque l'urbacultrice.

Toutes ces pratiques sont étudiées et recommandées par le programme 4 pour 1 000 de l'Inrae, qui estime qu'une augmentation du stock de carbone dans les sols de 0,004 % par an permettrait de neutraliser l’augmentation annuelle du carbone atmosphérique. Le sol est donc un enjeu majeur pour atténuer le dérèglement climatique. Selon l'institut, pour atteindre cet objectif, les politiques publiques doivent « favoriser le maintien des prairies permanentes, des zones humides et des forêts, où les sols ont généralement des stocks de carbone élevé [et] stopper l’artificialisation des sols ». Il faudrait également augmenter « les stocks de carbone là où ils sont faibles, c’est-à-dire essentiellement en zone de grandes cultures ».

Il y a donc un enjeu à favoriser les modes de production vertueux pour la résilience alimentaire des territoires et pour le stockage de carbone.

Raphaël Richard